30ème et dernier jour de confinement.
Aucun cas confirmé dans l'archipel des Marquises.
Il n'y a que très peu de pays au monde qui ne sont pas touchés par cette pandémie, la plupart sont dans le Pacifique.
Y aurait-il une prédisposition génétique au Covid-19 inexistante dans l'ADN de la civilisation maohi ? 🙏
Nous avons conscience d'être des privilégiés à pouvoir démarrer un déconfinement à l'heure où les compteurs des cas confirmés et des tristes décès inondent les écrans mondiaux.
La Polynésie dénombre à ce jour 52 cas uniquement sur Tahiti et 3 sur Moorea, sans cas graves ni décès.
L'Etat et le Gouvernement de Polynésie française ont donc décidé d'alléger les règles dans tous ces archipels préservés : Tuamotu, Gambier, Îles sous le vent et Marquises.
Notre confinement, c'était quoi ?
Nous avons choisi de le vivre sur l'île principale des Marquises, Nuku Hiva, dans la grande baie de la ville principale Taiohae.
Point de vue mouillage, c'est idéal. Une grande anse entrant dans les terres protégée par un quasi 360° de crêtes brise-vent. Notre ancre a pris racine dans un fond sablonneux après une rapide descente dans 10 mètres d'eau.
Le mouillage est suffisamment vaste pour accueillir sans problème une petite centaine de bateaux... Et ce fut le cas au plus fort de l'affluence.
Les Marquises sont une première escale de choix pour ceux qui arrivent de Panama, d'Equateur, des Galapagos ou encore du Mexique.
Mythiques, accueillantes, reposantes, elles ont, depuis des années, jalonné le journal de bord de nombreux équipages.
Imaginez les bateaux présents depuis des mois ou des années qui, comme nous, avaient choisi de ''confiner '' ici près de la capitale, des antennes internet, des administrations compétentes et de l'unique hôpital des Marquises associés à l'arrivage de la promo Transpac 2020 dont le World Arc :
Un melting pot
multiethnique,
multiculturel.
Malgré cette affluence qui aurait pu effrayer plus d'un natif, les équipages ont toujours été considérés comme partie prenante de la population.
Aucune restriction particulière n'a été mise en place par les autorités locales. Seul le bon sens a été requis.
Un grand merci à Mr Le Maire et tous les interlocuteurs (pompiers, agents municipaux, police municipale... ) pour cette compréhension et cette absence de ségrégation abusive de '' l'étranger ''.
Alors bien sûr, il y a les éternels insatisfaits.
Ceux qui n'ont jamais compris que les Affaires Maritimes par le biais du Haut Commissairiat nous interdise de nous baigner.
Ceux qui ne comprennent pas que pour préserver ces îles (et faciliter les rapatriements des équipages) les bateaux en provenance du large n'aient qu'une autorisation d'escale temporaire et aient obligation de continuer vers Tahiti.
On pourrait en parler pendant des heures... Mais, ce n'est pas le sujet.
Keep cool, on n'est pas les plus malheureux
Nous avons vécu 30 jours intégrés à une population toujours souriante et bienveillante. Nous avons pu descendre à terre sans plus de contraintes que celles imposées et respectées par les habitants. Nous avons eu accès aux épiceries de notre choix, aux banques...
Nous avons eu des appros non stop au quai ou à bord : de fruits, de légumes, de poissons, d'œufs... réalisés gratuitement par des producteurs locaux.
Pas question de profiter de la situation pour nous faire payer le moindre coût de livraison. Respect !!!
Merci beau peuple Enana 🙏
Nous avons eu aussi accès aux livraisons des bateaux ravitailleurs Aranui et Taporo. Merci Jean-Marc pour tes expéditions groupées depuis Papeete 🙌.
Nous n'avons manqué de rien, y compris de lien social. Il s'est réinventé par vhf interposées.
Un réseau organisé par et pour les enfants, un réseau girly, une radio paradise, des soirées Quizz, des flashs de partages d'informations locales.
Une fois de plus, chacun y est allé de sa culture et ses habitudes : des habitués des grands regroupements Yachties et leur ordre du jour détaillé quotidien au réseautage francophone sans autre prétention que celui de faire circuler les informations du jour.
Libres à chacun d'y participer ou pas.
La solidarité entre équipage a fait chaud au cœur les jours où l'on trouvait le temps plus long.
Comment ne pas relativiser quand un pain chaud, des brownies, une laitue, des glaces ou un masque tissu boat made vous sont livrés ou encore des truffes chocolat de Pâques et une brioche toute chaude alors que vous pointez le nez dehors au petit matin.
Comment ne pas bien démarrer le week-end quand les voisins allemands se sont occupés de faire livrer par le boulanger,? D'un coup d'annexe, pain frais et croissants 🥐🥐🥐 viennent illuminer un petit déjeuner au paradis.
Est-ce justement parceque l'on n'a plus accès directement les uns aux autres que l'on se préoccupe de ses voisins (que l'on ne connaissait pas avant !)?
Confinement associé en Polynésie avec l'interdiction de vente d'alcool, l'immobilisme, les mélanges socio-culturels et la perte de la précieuse liberté des navigateurs. Tous les indicateurs étaient au rouge pour que la situation devienne explosive.
Et pourtant, à quelques "enfantillages" près, tout a été calme.
L'étude sociologique a été passionnante. Distanciation sociale n'est pas synonyme d'isolement social même sur l'eau.
Nous avons découvert la faculté des êtres humains à être pour beaucoup généreux et inventifs, pour une minorité nombriliste et vindicative mais pour la majorité patients, tolérants, respectueux et impliqués.
Nos soirées confinées ont été rythmées par les huit saisons de Game of thrones. La journée, la version Game of boats était nettement plus pacifiste et amusante.
Pour l'heure la cloche a sonné. À partir de lundi, nous n'aurons plus à remplir nos attestations et passer au check-point. On en serait presque à le regretter tant c'était agréable de retrouver les sourires de nos interlocuteurs locaux jour après jour.
On ne va pour autant pas bouder notre plaisir d'aller gambader sur les chemins parmi les arbres fruitiers et les fleurs tropicales, d'aller retrouver nos amies les raies mantas en snorkeling.
La circulation maritime est toujours interdite à l'exception du fret et des urgences médicales. Ti'Amaraa a pris ses habitudes à onduler autour de sa chaîne.
Nous ne sommes pas pressés. Le vagabondage nautique attendra. Nous sommes bien decidés à participer au redémarrage économique de cette île par notre statut d'uniques "touristes" à la ronde.
Bien sûr, la vigilance reste au rendez-vous. Monsieur Virus n'a peut-être pas dit son dernier mot.
"Gémir n'est pas de mise aux Marquises" a t'il chanté.